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4 avril 2013 4 04 /04 /avril /2013 22:10

costa-croisiere-devant-les-juges-des-referes_75029_w250.jpgLes lecteurs de ce blog ne seront pas surpris. Le projet de PDU est fragilisé depuis l'avis défavorable de l'enquête publique. Ceci n'a pas donné lieu à un changement de cap mais à une mascarade en forme de tables-rondes. Plein de propos intéressants sur l'expérience de la Rochelle ou d'Amiens... mais pas grand chose pour notre projet d'Angoulême.

La ligne était claire: "nous avons fait des erreurs de forme, nous allons donc communiquer".

Objectivement, ce choix n' a leurré personne. Sauf que la décision  est encore ouverte et qu'il ne faudrait pas triompher trop vite en pensant désormais que le Busway ne se fera pas.

La responsabilité d'un élu, notamment dans cette période de troubles et de doutes généralisées, est de montrer de la persévérance, de la cohérence et de la combativité. On a trop vu d'exemples d'intermittents du mandat qui ne ressortent qu'à la veille des scrutins.

Les élus du Grand Angoulême vont devoir se prononcer le 11 avril prochain sur le PDU. Le projet n'a pas bougé: TCSP, troubles pour le commerce, problèmes de stationnement, budget aussi flou que démesuré... tout est sur la table. 59 personnes vont devoir se prononcer.

J'ai donc choisi de leur écrire à chacun pour leur partager ma lecture sur les risques de ce projet.

Rien n'est jamais joué. Les cyniques n'ont pas toujours le dernier mot. D'ailleurs, j'ai fait le choix d'annoncer d'ores et déjà que ce projet me semble illégal et que je ferai un recours dès le lendemain du vote si celui-ci devrait être majoritairement favorable au projet actuel. A suivre...

 

Angoulême, le 2 avril 2013

 

Mesdames et Messieurs les conseillers communautaires,

 

Comme tous les élus des collectivités consultées dans le cadre de la préparation du PDU, les conseillers régionaux ont eu à se prononcer sur le projet soumis à votre vote le 11 avril 2013. C’est pourquoi je souhaite, aujourd’hui, attirer votre attention sur cette question qui me semble engager durablement notre agglomération et les communes qui la composent.

En effet, malgré les critiques substantielles formulées par le commissaire enquêteur, qui ont conduit, fait rare, à un avis défavorable, aucun changement majeur n’a été apporté. Ces critiques ont été balayées d’un revers de main au prétexte qu’il s’agirait de remarques de forme.

L’argument est tellement invraisemblable que je vous rappelle la teneur de certaines de ces remarques. Les commissaires enquêteurs ont relevé que « le choix réalisé et présenté à l’enquête est très fermé » ; « portait sur des choix n’ayant pas fait l’objet de justifications suffisantes » Et de conclure qu’il comporte « des insuffisances majeures ».

Citons ici quelques critiques fortes émises envers le PDU soumis à concertation :

  • "l'objectif des 15 minutes (pour rejoindre le centre ville en partant des diverses communes de l'agglomération) est louable mais parait inaccessible pour les communes les plus éloignées" ;
  • "on peut s'interroger sur les conséquences d'une éventuelle indemnisation des préjudices des commerçants pour un montant nulle part évoqué" ;
  • "la commission n'est pas convaincue de l'innocuité du projet en ce qui concerne le commerce, en particulier dans les zones concernées par le Busway" ;
  • "pas d'examen des solutions alternatives" ;
  • "ce projet de PDU comporte des insuffisances majeures" …

 

Les six tables rondes organisées en février et en mars dernier n’ont eu que pour objet de convaincre que ce qui avait été réalisé entre d’autres lieux avait vocation à être importé dans l’agglomération. Il n’a été aucunement tenu compte des spécificités de notre territoire.

 

Les conclusions du commissaire enquêteur auraient justifié une nouvelle enquête publique ou à défaut une nouvelle consultation des conseils municipaux. Je regrette que ni l’une ni l’autre de ces options n’aient été retenues.

Le sujet n’est pas anodin puisqu’il conduit à penser que le projet de PDU présenté lors de l’enquête publique était incomplet. Je vous rappelle que l’article 28 de la loi du 30 décembre 1982, qui n’a pas été abrogé contrairement à ce qui a pu être dit ici ou là, exige que le PDU soit accompagné « d'une étude des modalités de son financement et de la couverture des coûts d'exploitation des mesures qu'il contient ».  Vous constaterez dans le document joint un exemple de PDU qui intègre un cadre financier. Ceci permet que les choix qui engagent l’avenir ne se limitent pas à des perspectives sans mesures.

Ce point a été souligné, avec les élus de l’opposition municipale d’Angoulême et d’autres signataires, dans une contribution collective. Je n’ai pas constaté que le document ait été amendé en ce sens.

 

Le rapport du commissaire enquêteur a lui-même indiqué « une absence totale de chiffrage, particulièrement concernant le TCSP, mais également le plan d’échange multimodal, indubitablement, il en résulte un affaiblissement du débat public qui s’est reporté sur des chiffres invérifiables sans doute annoncés verbalement lors de réunions d’information mais dont nous ignorons totalement les sources ».  

 

Il aurait été normal que l’une des tables rondes organisées ces dernières semaines porte sur le coût des projets d’un PDU. Ce ne fut pas le cas alors que les habitants de l’agglomération sont sensibles à cette question.

Il me semble que l’absence de cette étude rend le PDU illégal en l’état actuel.

 

Au-delà de la dimension strictement juridique, l’absence d’analyse financière est préjudiciable pour l’avenir du Grand Angoulême dans le contexte actuel des finances publiques.

Au plan local, c’est le financement du principal projet, le transport en commun en site propre ou Busway, qui nécessite d’être revu en profondeur.

 

Son coût, qui me paraît démesuré, n’a cessé d’évoluer. Surtout son financement est incertain.

Le taux du versement transport a été porté à son maximum (1,8 %) à compter de décembre 2010, ce qui a constitué une augmentation de 71 % pour les entreprises et les collectivités employant plus de 9 personnes. Le fait qu’il soit calculé à partir de la masse salariale n’incite guère à l’optimisme quant à son rendement dès lors que la masse salariale des entreprises du territoire n’est pas garantie. J’en veux pour preuve la somme inscrite au budget de la ville d’Angoulême pour 2013 qui passe de 405 000 euros à 394 500 euros. Si cette situation est révélatrice de l’ensemble des employeurs concernés, il est à craindre que l’équilibre envisagé initialement n’existe, d’ores et déjà, plus.

 

La réalisation d’un document de prospective financière aurait permis d’envisager des scénarii pour pallier l’éventuel manque à gagner du versement transport... ou les surcoûts qui sont fréquents dans des opérations de ce type. D’autres politiques menées par le Grand Angoulême devront-elles être amputées alors que leur exercice est prioritaire ? Faudra-t-il augmenter les taux de fiscalité directe, notamment celui de la taxe d’habitation sur lequel le Grand Angoulême dispose d’un pouvoir de décision depuis 2010 ?

Il convient également d’envisager l’hypothèse dans laquelle le busway ne se réaliserait pas et qui conduirait à devoir rembourser les entreprises et les collectivités, ce qui créerait une bombe financière pour l’institution (à raison de 7 millions par an, le remboursement s’élèverait à 28 millions d’euros en 2014).

 

Plus encore, chacune des communes de notre agglomération doit craindre que le déséquilibre de ce projet ne menace durablement nos capacités à investir demain. Qui parmi les élus aujourd’hui ne constate pas la difficulté à accéder aux crédits nécessaires ? Qui peut penser que demain nous n’aurons pas des difficultés plus grandes pour engager d’autres projets d’envergure ? Pouvons-nous penser engager de nouveaux projets de rénovation urbaine (je pense aux nécessités criantes à Basseau comme à Bel Air- Grand Font) sans imaginer un minimum de cofinancement ?

 

Les perspectives de financement par l’Etat incitent à la prudence dès lors que les dotations devraient être réduites de 1,5 milliards d’euros en 2014 et en 2015.  Pouvons-nous fermer les yeux sur cette réalité en engageant une politique qui ne réponde pas à nos besoins prioritaires ?

 

Ces différentes raisons me conduisent à penser que ce projet de PDU est démesuré dans son ampleur, éminemment critiquable dans ses modalités et conséquences, et dangereux pour notre avenir. C’est pourquoi il me semble légitime de voter contre son adoption en l’état afin de le revoir profondément en trouvant d’autres voies pour moderniser nos transports.

 

Pour ce qui me concerne, si le PDU est malgré tout adopté dans les termes actuels, je saisirai le Tribunal administratif de Poitiers pour qu’il en vérifie la légalité et, si ma lecture est juste, qu’il en prononce l’annulation. Ceux d’entre vous qui souhaiteront s’associer à cette démarche seront bien entendu les bienvenus.

 

Je vous prie d’agréer, Mesdames et Messieurs les conseillers communautaires, l’expression de toute ma considération.

Vincent YOU

Conseiller Régional

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